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Wimoov prône la «Liberté, égalité, mobilité !» Une action menée dans les territoires et les quartiers prioritaires

Pour les habitants des territoires enclavés – les zones rurales isolées et les quartiers prioritaires de la politique de la ville en particulier –, la mobilité se voit freinée par le manque de transports en commun réguliers et des obstacles socio-économiques ou cognitifs. Pour désenclaver ces territoires et favoriser les déplacements de leurs habitants, des politiques publiques encouragent la mobilité inclusive et ses solutions alternatives et adaptées aux besoins des habitants. Exemple avec la plateforme de mobilité Wimoow dans le Val d’Oise.

Agence de Pôle emploi, dans le quartier prioritaire de La Muette, à Garges-lès-Gonesse, ville de 42 000 habitants proche de la zone aéroportuaire de Roissy. Ce matin de janvier, Géraldine, Bouna, Ali et quatre autres demandeurs d’emploi sont venus, parfois de loin, participer à une réunion de Wimoov. Leur but : s’informer sur les aides et les solutions alternatives de mobilité.

Deux participants ont le permis en poche, d’autres non. Tous partagent un même projet : pouvoir se déplacer, être mobiles pour leurs activités de la vie quotidienne et, surtout, pour accéder à un emploi. Un tour de table s’engage, et chacun expose son projet de mobilité et ses écueils. « J’habite Bonneuil-en-France, un petit village de 1 000 habitants du Val d’Oise. Même pour aller au tabac, c’est toute une mission !, témoigne Fatoumata. Alors, j’ai besoin d’un véhicule pour aller travailler, mais j’ai arrêté mes leçons de conduite faute de moyens financiers. » Une difficulté économique partagée par Fatiha : « Je recherche un emploi dans le secteur de la propreté. Je me suis inscrite dans une auto-école, mais je n’ai pas commencé les cours faute de budget ». Une autre jeune femme expose sa situation : « J’ai eu un entretien pour travailler à Roissy, mais sans permis de conduire, je ne pourrai pas prendre le poste ».

Autant de cas qui démontrent combien les questions de mobilité quotidienne se posent à l’échelle de bassins de vie et ont un rôle déterminant dans l’accès à l’emploi.

Dépasser sa « carte mentale » pour élargir ses recherches d’emploi

Ici, dans le Val d’Oise, trois conseillers mobilité de la plateforme Wimoov interviennent, une fois par mois, dans chacune des dix agences Pôle emploi du département. Pour ouvrir la réunion, la conseillère interroge les participants sur leurs pratiques. Ont-ils un permis de conduire, un véhicule ? Sont-ils usagers des transports en commun ? Y accèdent-ils facilement à pied ? Connaissent-ils les tarifs réduits et les aides disponibles ? Utilisent-ils des appli pour organiser leurs trajets ?

Le « test de mobilité » permet de cerner les usages des sept demandeurs d’emploi et leurs projets personnels : passer le permis, se véhiculer ou optimiser leurs déplacements en transports en commun.

Pauline Melard, conseillère mobilité, insertion et seniors de la plateforme Wimoov de Garges-lès-Gonesse

« Cet atelier vise à informer sur les dispositifs liés à la mobilité dont les demandeurs d’emploi peuvent bénéficier pour se rendre à un entretien, accéder à une mission temporaire ou un emploi fixe. Je leur présente donc les aides disponibles, en fonction de leurs situations et âges, pour avoir des tarifs réduits ou passer son code, les démarches à faire pour les obtenir, les possibilités de cumuler les aides au permis, etc. En effet, par méconnaissance des aides auxquelles ils ont droit, les demandeurs d’emploi utilisent souvent des moyens de transports coûteux, à plein tarif, et ils renoncent à se déplacer à cause de cela. Du coup, ils développent une « carte mentale » restreinte et n’arrivent pas à se projeter dans une recherche d’emploi au-delà de leur commune ou de la commune limitrophe. C’est une entrave à leurs recherches.

Notre but, c’est de leur faire découvrir des astuces et des solutions alternatives à l’achat, coûteux, d’un véhicule. Par exemple, nous pouvons leur louer un scooter ou un vélo à des tarifs très modestes (2 à 3 euros par jour). Pour ceux qui sont contraints de se véhiculer, car trop éloignés des transports ou en horaires décalés dans leur activité, nous avons aussi repéré des solutions adaptées et de proximité : un garage solidaire, une auto-école sociale pour passer le permis à un coût raisonnable, un mode d’emprunt en micro-crédit, etc. Après cette séance d’information, Wimoov peut accompagner individuellement ceux qui le souhaitent, par exemple pour s’inscrire en candidat libre au code de la route ou pour apprendre à lire un plan et à s’orienter dans le RER. »

Plateforme Wimoov de Garges-lès-Gonesse : 01 30 11 08 10.

À l’issue des séances d’information, l’association Wimoov propose des ateliers pour préparer le code de la route, apprendre à lire une carte, se repérer sur un plan ou comprendre le fonctionnement d’un réseau de transport urbain. Ils sont suivis d’une mise en pratique, comme ici sur la ligne 8 du métro parisien.

Mobilité inclusive, de quoi parle-t-on ?

Le constat : savoir conduire ou faire du vélo, posséder un véhicule ou pas, lire un plan et se repérer dans une ville, comprendre un réseau de transport ou utiliser une application smartphone pour ses trajets nécessite des compétences et des moyens matériels, dont tout le monde ne bénéficie pas. À ces difficultés cognitives, culturelles, physiques ou économiques s’ajoutent des disparités territoriales d’accès à la mobilité.

L’enjeu : ces difficultés entraînent une forme d’exclusion, particulièrement dans les territoires périurbains et ruraux et dans les zones mal desservies des grands pôles urbains. Or, l’accès aux aptitudes et aux moyens de se déplacer participe à l’insertion sociale et professionnelle.

Une solution de proximité : la mobilité inclusive ou solidaire. Cette approche consiste à apporter des solutions de mobilité partout et pour tous, à l’échelle d’un territoire. Des structures telles que les « plateformes de mobilité », comme Wimoov, proposent ainsi aux personnes ayant des difficultés de déplacements des actions d’information et d’accompagnement individuel pour devenir autonomes dans leur mobilité.

Les inégalités de mobilité dans les quartiers prioritaires

Le déficit de mobilité renforce les inégalités sociales et professionnelles. Dans les quartiers prioritaires, seuls 57 % des habitants possèdent le permis de conduire contre 83 % ailleurs. La part des ménages ne possédant aucune voiture est deux fois plus importante dans les quartiers de la politique de la ville qu’en dehors (une caractéristique partagée par les espaces très ruraux qui connaissent également un niveau d’équipement automobile bien inférieur à la moyenne nationale). Et cette faible mobilité pénalise surtout les actifs.

Lire la fiche-étude de l’Observatoire national de la politique de la ville sur la mobilité quotidienne dans les quartiers de la politique de la ville (janvier 2019).

2 millions d’euros : c’est le montant des aides de la politique de la ville attribuées aux projets de soutien à la mobilité, en 2018. dans le cadre des contrats de ville, ils ont permis de développer des garages solidaires, du transport à la demande, la mise à disposition de deux-roues ou de vélos...

L’autonomie : l’objectif n°1

Samou, 32 ans, agente de sûreté et habitante de Garges-lès-Gonesse

« J’ai travaillé pendant huit mois comme agent de sûreté à l’aéroport de Roissy, mais j’arrivais souvent en retard en prenant le bus. Ça me pénalisait. C’est un travail en horaire décalé. Il existe bien un service de transport à la demande mis en place par la plateforme de l’aéroport de Roissy, mais il ne dessert pas mon quartier. Tant que je ne suis pas autonome, il me sera difficile de reprendre mon métier. En attendant, je travaille à temps partiel comme agent d’accueil, ici, dans cette agence de Pôle emploi. Je suis venue m’informer des solutions possibles pour les demandeurs d’emploi pour acheter un véhicule. En voiture, Roissy, c’est à seulement quinze minutes de chez moi ! »

Éva, conseillère référente mobilité de Pôle emploi, à Garges-lès-Gonesse

« Le manque de mobilité est, aujourd’hui, un frein important au retour à l’emploi de nos publics. En effet, à Garges-lès-Gonesse, seul un quart des demandeurs d’emploi inscrits en catégorie A possède le permis de conduire et un véhicule. Or, les secteurs d’activités les plus représentés dans notre bassin d’emplois sont les services à la personne et aux collectivités, le transport/logistique, le BTP et le commerce. Pour ces secteurs, la mobilité est un prérequis…

Pour favoriser la correspondance entre l’offre et la demande ainsi que l’accès à l’emploi, Pôle emploi propose différents types de solutions. Par exemple, l’aide financière au permis de conduire sous conditions de ressources, de durée d’inscription et surtout de sa nécessité compte tenu des caractéristiques de l’emploi (horaires décalés, intervention sur plusieurs sites…). Une aide d’un montant maximal de 1 200 €, en Île-de-France, peut être accordée. Par ailleurs, une aide à la mobilité en situation de reprise d’emploi ou de formation éloignée du domicile peut être octroyée (sous conditions de ressources) afin de faciliter les déplacements, les frais de repas et d’hébergement.

Notre partenariat avec Wimoov, mis en place depuis plusieurs années, permet de favoriser, de manière pédagogique, l’apprentissage à la mobilité de nos publics (mobilisation des aides financières, accompagnement à l’utilisation des transports en commun, lecture de plan…) La mobilité devient ainsi un obstacle franchissable avec ce partenariat. Le champ des « possibles géographiques » s’ouvre à nos demandeurs d’emploi (notamment sur le bassin aéroportuaire). Ils peuvent avoir davantage d’opportunités d’emploi sur les métiers en tension, notamment dans le BTP et les services à la personne dans notre bassin d’emplois. »

Interview de Florence Gilbert, directrice de l'association Wimoov

« Nos concitoyens ne doivent pas être assignés à résidence contre leur gré »

À quelle occasion et pourquoi est née l’association Wimoov ? Notre association a été créée en 1998, mais l’origine de Wimoov remonte aux grandes grèves des transports de 1995. À l’époque, sur le campus universitaire de Nanterre (92), enseignants et étudiants se sont organisés pour partager leurs voitures, donnant naissance au covoiturage avant l’heure… Notre volonté, c’était de les accompagner vers cette nouvelle solution de mobilité.

En quoi consiste votre mission ? Notre travail consiste à diagnostiquer les facteurs qui expliquent les difficultés de déplacement sur un territoire, ou une partie de celui-ci. Les raisons peuvent provenir du manque d’infrastructures collectives, mais aussi de difficultés individuelles – matérielles, financières ou physiques – qui contraignent ses habitants.

Nous nous chargeons aussi, notamment à travers la mise en place d’un comité de pilotage, de fédérer et de coordonner toutes les solutions de déplacement disponibles sur le territoire : transports en commun, aires de covoiturage, pistes cyclables, services à la demande, auto-partage, etc. Par exemple, en travaillant avec les réseaux de transport, nous pouvons faire aménager les horaires d’une ligne de bus pour augmenter sa fréquence et mieux répondre aux besoins des usagers.

À partir de là, au niveau local, nos plateformes vont construire des solutions de déplacement multimodal, collectives ou individualisées, pour leurs bénéficiaires. Les solutions que nous leur proposons ont un ancrage territorial, très localisé et adapté en fonction de l’offre de transports disponible ou pas, des zones d’emploi du territoire, des usages de ses habitants… Wimoov propose à ses bénéficiaires un parcours mobilité, composé d’une ou de plusieurs solutions (pédagogiques, matérielles ou financières) afin qu’ils puissent retrouver une mobilité pérenne en trois mois, en moyenne.

Justement qui sont vos bénéficiaires ? Autant des hommes que des femmes. Par ailleurs, 30 % d’entre eux sont des jeunes, et 40 % de notre public vient des quartiers prioritaires. Ce sont des prescripteurs, comme les centres sociaux, les missions locales, Pôle emploi ou même des mutuelles pour les seniors, qui nous les adressent. En majorité, ces personnes sont dans un parcours d’insertion professionnelle, dont la mobilité est un facteur déterminant.

Aujourd’hui, où intervenez-vous ? Wimoov intervient sur des territoires très divers, répartis sur tout le territoire national : dans le périurbain, les zones rurales, les quartiers prioritaires de la politique de la ville… Nous allons bientôt ouvrir une plateforme dans le 18e arrondissement de Paris.

Nous avons mis en place 27 plateformes de mobilité, qui couvrent 43 zones d’emplois. Notre ambition, c’est de desservir l’ensemble des 322 zones.

Comment Wimoov travaille-t-il avec le CGET et comment s’exprime ce partenariat ? Wimoov est « le bras armé » de la mobilité inclusive dans les quartiers prioritaires et dans les ruralités. Comme le CGET, nous sommes très conscients des enjeux pour les territoires enclavés et de l’impact que cela engendre sur la vie quotidienne. Le CGET nous aide à financer nos plateformes sur ces territoires pour éviter que nos concitoyens ne soient assignés à résidence contre leur gré.

Nous travaillons également de concert pour mener des expérimentations, des études et des outils, dont un projet de guide sur les plateformes de mobilité. Nous partageons cette démarche au sein du Laboratoire de la mobilité inclusive, où nous mettons en avant des solutions qui ont fait leurs preuves et peuvent essaimer. Nous leur donnons de la visibilité, comme à l’occasion des Assises nationales de la mobilité de 2017. Récemment, nous avons contribué à l’élaboration du projet de loi d’orientation des mobilités.

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Communication du CGET - Janvier 2019
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Credits:

Crédits : N. Kharbache/Communication CGET - Wimoov, JL Avenir et Direction de la communication de la ville de Garges-lès-Gonesse. Reportage réalisé avec la contribution de la direction de la Ville et de la Cohésion urbaine et la direction du Développement des capacités des territoires du CGET.

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